WEEK-END AU LAC DU DER, CHAMPAGNE (FR)
Après avoir pris Jacques au passage à Armentières, nous prenons la route de la Champagne vers 7 h 15. Via St Quentin, Laon, Reims, Châlons-en-Champagne, nous rallions le lac du Der. En route, nous observons quelques Buses variables (Buteo buteo), quelques Chevreuils (Capreolus capreolus) et quelques Corbeaux freux (Corvus frugilegus). À une trentaine de km au sud-ouest de St-Dizier, nous apercevons nos premiers (grands) groupes de Grues cendrées (Grus grus) postés dans les champs. L’excitation monte … que nous réservera notre (court) séjour ?
Pour rappel, le lac du Der est, en novembre, une halte migratoire (en route vers l’Espagne et l’Afrique du Nord pour y hiverner) des dizaines de milliers de ces grands échassiers terrestres à hautes pattes et long cou et dont l’envergure est de 1,8 m à 2 m. Les oiseaux transitant par la France nichent principalement en Scandinavie, Allemagne du Nord et Pologne.
Vers 11 h, nous arrivons à destination. Prospection du lac, en compagnie du groupe arrivé la veille, au niveau de la presqu’île de Champaubert : nombreuses Sarcelles d’hiver (Anas crecca), Canards chipeau (Anas strepera) et souchets (Anas clypeata). Les Canards pilet (Anas acuta) sont loin, malheureusement (la longue-vue est nécessaire). Une douzaine de Grandes aigrettes (Ardea alba) se laisse admirer. Un peu plus tard, en route vers la digue, nous avons la chance d’observer un petit groupe de Grues cendrées constitué d’adultes et d’un jeune : nous avons ainsi la possibilité de photographier et de détailler tout à loisir, de la voiture, les différents plumages.
Pique-nique sur la digue, face aux souches où se sont posés, la veille, deux Pygargues à queue blanche (Haliaeetus albicilla)… Nous partons ensuite prospecter l’étang de la forêt à Outines : juste en face de l’observatoire, six élégantes Aigrettes garzettes (Egretta garzetta) cherchent nerveusement leur nourriture. Les appareils-photos crépitent …
Au bout de l’étang, une douzaine de Grandes aigrettes. Grèbes castagneux (Tachybaptus ruficollis), Canards souchets et pilets parsèment l’étang. Sur une langue de terre, à quelques mètres de l’observatoire, un groupe de Ragondins
(Myocastor coypus) dort au soleil. Nous voyons surtout de grosses boules de poils ; après un peu de patience, un jeune daigne montrer le museau.
S’ensuit une discussion concernant les différences morphologiques de ce rongeur avec le Rat musqué (Ondatra zibethica) que nous verrons également au même endroit. Le Ragondin est bien plus grand que le Rat musqué, mais lorsqu’il s’agit d’un jeune, la différence de taille n’est plus si apparente ! Pour rappel, ces deux espèces ont été introduites en Europe. Sur le petit étang d’Arrigny, nous verrons surtout des Grèbes huppés (Podiceps cristatus) et seront gratifiés du vol bleu métallique d’un Martin-pêcheur (Alcedo atthis). Sous la surface de l’eau, nage une myriade d’alevins. Nous entamons ensuite une très longue promenade dans un vaste paysage sans haies, ni bosquets où on verra une petite quarantaine de Chevreuils, mais aucun oiseau.
En reprenant le chemin vers le gîte, nous jouissons d’une magnifique image de cinq Grues cendrées, en ombres chinoises, cou tendu, dressées sur leurs hautes pattes, sur une butte… une vision à jamais gravée dans ma mémoire, tellement elle était belle. Le soir, le retour au dortoir des Grues cendrées sera décevant car la plupart des oiseaux passent loin de nous...
Le lendemain matin, nous allons voir le lever des Grues du côté de Nuisement (conseillé par le tenancier du gîte): c’est enfin le splendide spectacle tant attendu : images et son (krrou, krrou) ; vols en ligne oblique ou en V d’un millier d’oiseaux.
Après avoir englouti le petit-déjeuner et libéré les chambres, nous décidons de prospecter les alentours au lieu d’aller à la Ferme aux grues. Derrière une ferme, dans une prairie, de nombreuses Grues cherchent leur pitance. L’exploitante nous autorise à traverser sa cour pour les voir de plus près. Chacun a le temps de bien les observer aux jumelles et/ou à la longue-vue.
Un peu plus tard, au bord de la route, un petit groupe d’une dizaine de Grues baignées de soleil qui s’envole lorsqu’on arrête la voiture …dommage que les Grues soient si farouches …
Je ne peux terminer ce texte sans parler d’un paysage typique de Champagne : les arbres couverts de boules de Gui (Viscum album).
Le Gui parasite les feuillus (surtout les peupliers, tilleuls, pommiers ; les chênes et les hêtres sont bien plus réfractaires à la plante) mais aussi les sapins et les pins. La Grive draine (Turdus viscivorus) aime sa baie qu’elle expulse moins d’une demi-heure après l’avoir avalée, sous la forme d’une longue fiente visqueuse qui s’accroche en tombant aux branches d’un arbre. La Mésange bleue (Parus caeruleus) raffole des graines du gui qu’elle pilonne et concasse grâce à son bec court, massif et pointu.
Sur le chemin du retour vers la Belgique, nous irons nous balader dans la forêt de Verzy pour y voir les fameux arbres tortueux (généralement des hêtres), les faux.
À la sortie du bois, nous verrons l’Helvelle crépue (Helvella crispa), un champignon ascomycète (spores formées à l’intérieur d’asques) assez particulier.
Nous terminons le séjour (pendant lequel nous avons bénéficié d’un temps clément) par le petit fortin de Sinaï d’où nous jouissons d’un splendide panorama sur la Champagne.
J’y retournerai certainement mais alors pour plusieurs jours, car le séjour était trop court à mon goût …
Texte : Paulette Claerhout
Photos : Jean-Marie Vandelannoitte