Qu’est-ce qu’une galle ?
C’est une déformation structurée d’une plante, provoquée par un parasite.
Ne pas confondre avec « la gale », maladie de la peau provoquée par des acariens.
Une quelconque déformation des tissus de la plante ne signifie pas pour autant qu’il s’agisse d’une galle. Elle peut être consécutive à un traumatisme subi par la plante (blessure, pulvérisation, maladie…). Généralement, une galle s’accompagne d’un gonflement, d’une décoloration des tissus, d’un raccourcissement des entre-nœuds.
L’étude des galles (ou cécidies), s’appelle « La cécidologie ».
Par convention, le nom d’une galle est celui de l’organisme qui l’a provoquée.
Quels sont les parasites responsables ?
- Une bactérie = bactériocécidie
Ex : Agrobacterium tumefaciens, souvent à la faveur d’une blessure.
- Un champignon = mycocécidie
Ex : Neonectria galligena (chancre des arbres fruitiers)
Même l’oïdium peut être considéré comme une galle, s’il est déformant.
- Un animal = zoocécidie
- Insectes, acariens, vers nématodes.
Ex : Agathomyia wankowiczii sur Ganoderma applanatum (seul ganoderme concerné).
- Un myxomycète = n’est pas un champignon ! (Classé dans le règne des protistes, comme les amibes)
Ex : Plasmodiophora brassicae (la hernie du chou, galle sur les racines)
- Un végétal = phytocécidie
Ex : le gui (considéré comme un hémi-parasite en botanique)
Nous n’aborderons que les galles causées par des animaux et, plus particulièrement par des insectes et des acariens.
Nous sommes ici à la frontière entre la botanique et l’entomologie.
Quels sont les organismes cécidogènes concernés ?
Les hémiptères homoptères : pucerons et psylles, les diptères, les hyménoptères, les coléoptères, les lépidoptères et les acariens.
Tous ces ordres ne contiennent pas que des organismes galligènes !
Peut-on réellement parler de parasitisme ?
La plante ne subit apparemment aucun préjudice, mais continue à croître et à effectuer sa photosynthèse. Elle différencie de nouveaux tissus pour assurer au « parasite »,
- Le gîte : protection contre les intempéries, la déshydratation, les prédateurs…
- Le couvert : nouveaux tissus très nourriciers, très riches, qui n’existeraient pas en dehors de la formation d’une galle.
Parfois, la relation de mutualisme est clairement établie :
- Bactéries Rhizobium sur racines de Fabacées (elles assurent la nutrition azotée de la plante).
- Blastophage du figuier (galle de fleurs, assure la pollinisation du figuier).
- Saules porteurs de la galle « Rabdophaga » ne sont pas broutés par les rennes.
- Acariens présents dans les poils, sous les feuilles, protègent la plante de divers prédateurs.
- Les galles résultent d’une longue coévolution entre les plantes et les organismes cécidogènes.
Où se situent les galles ?
Tous les organes de la plante peuvent être affectés :
- Les feuilles : ex Cynips quercusfolii (Hyménoptère Térébrant, taille de guêpe, ovipositeur, pas de dard). Galle « cerise » du chêne, sous la feuille, toujours sur une nervure.
- Les tiges : ex Urophora cardui (Diptère Téphrite). Rend stérile la tige du cirse des champs (uniquement) infestée, qui se termine par un bouquet de feuilles au lieu d’une inflorescence. Les larves hivernent dans la galle, qui se durcit. Les imagos émergent au printemps.
- Les fleurs : ex Dasineura symphyti (diptère Cecidomyiidae, famille responsable de 35% des galles). Galle sur la Consoude officinale dont la base du calice est épaissie et velue.
- Les bourgeons : ex Phytoptus avellanae (acarien), qui pond entre les écailles des bourgeons de noisetier.
- Extrémité des rameaux : galles d’apex.
Ex : Jaapiella bryoniae, rosette terminale de feuilles déformées et pileuses, sur la bryone dioïque.
- Les racines : ex Frankia alni, bactéries fixatrices d’azote sur les racines de l’aulne glutineux.
Comment se forme une galle ?
1) Modèle Cecidomyiidae : la ponte a lieu sur la feuille, qui s’hypertrophie et englobe le
parasite en formant une galle « en poche ». C’est souvent le cas des pucerons, acariens et de certains diptères.
Ex : Aceria erinea, bosses saillantes sur les folioles du noyer, avec erineum de poils blancs, correspondant aux bosses, sous la feuille.
2) Modèle Tenthredinidae : l’insecte pond son œuf à l’intérieur des tissus végétaux, en y injectant des sécrétions qui provoquent une hypertrophie englobant la larve.
C’est souvent le cas des coléoptères, lépidoptères et tenthrèdes.
Ex : Gracillaria syringella (microlépidoptère), mineuse du lilas, aussi présente sur le troène, le deutzia, le frêne et le fusain d’Europe. (Exception : non inféodée à une seule espèce botanique).
3) Modèle Cynipidae :
Le plus complexe : l’œuf est pondu soit à l’intérieur, soit à l’extérieur des tissus végétaux. Il s’y enfonce grâce à ses propres enzymes. Ex : Diplolepis nervosa (rare), sur groupe Rosa canina. La galle tombe au sol en automne, pour la métamorphose.
Qu’est-ce qui déclenche la cécidogénèse ?
Soit la ponte de la femelle, qui injecte certaines substances. (Pontania)
Soit les propriétés enzymatiques de l’œuf (Cynips)
Soit l’activité des larves (Mikiola).
Quels types de galles peut-on observer ?
Pour la même espèce, les galles de la génération « bisexuée » sont très différentes de celles de la forme « agame ». (Reproduction par parthénogénèse, produisant uniquement des femelles). Elles apparaissent soit au printemps (bisexuées), soit à l’automne (agames), ont des formes et des emplacements différents, soit sur la même plante, soit sur des espèces tout à fait différentes. (Ex : Neuroterus quercusbaccarum sur le chêne).
Acariens : galles en petites poches avec dessous un érineum, enroulements serrés ou replis de feuilles chiffonnées, crispées. Sur bourgeons : hypertrophie, forte pilosité blanchâtre.
Hémiptères : Homoptères (pucerons et psylles)
Pucerons : déformations diverses, enroulements moyennement serrés des feuilles.
Ex : Pemphigus spyrothecae sur peupliers noirs ou hybrides. Pétioles spiralés, épaissis (pucerons de la forme agame)
Psylles : émettent des sécrétions cireuses blanchâtres.
Ex : Trioza centranthi sur la valériane rouge (feuilles et fleurs épaissies, gonflées, décolorées).
Diptères: souvent des Cécidomyiidae, petits moucherons sans pièces buccales.
Certaines larves possèdent une spatule sternale.
Ex : Dasineura urticae (poils urticants sur la galle), feuilles et fleurs de l’ortie dioïque.
Hyménoptères : Tenthrèdes (Symphites, pas de taille de guêpe, « mouches à scie ») dont les larves sont de fausses chenilles (plus de cinq paires de fausses pattes). Ex : Pontania proxima sur le saule blanc. Galle bilatérale des feuilles.
Et Cynips (Apocrites, taille de guêpe, ovipositeur en forme de tube, pas de dard)
Ex : Diastrophus rubi, renflement fusiforme des tiges de la ronce.
Coléoptères : Charançons, apions, longicornes. Galles de tiges fusiformes.
Ex : Saperda populnea sur les peupliers et les saules. (Cavité en forme de point d’interrogation).
Lépidoptères : Enroulement lâche des feuilles, galles tentiformes sur les feuilles ou galles de tiges.
Ex : Adaina microdactyla sur l’eupatoire chanvrine. Epaississement de la tige, proche d’un nœud, percé d’un trou pour l’évacuation des déchets de la larve et l’émergence de l’imago.
Certaines galles ressemblent étrangement à des fruits :
- Drupes : Andricus kollari. (Chêne)
- Gousses : Dasineura fraxini (frêne)
- Infrutescences : Andricus foecondatrix. (Chêne)
Certaines galles sont comestibles et vendues en Orient pour en faire de la confiture.
Autrefois, en France, Liposthenes glechomae était consommée comme une petite pomme. (Lierre terrestre).
Certaines galles sont de véritables HLM miniatures.
Ex : Diplolepis rosae (Bédéguar).
On peut y trouver : l’organisme cécidogène (Cynips), plus d’autres espèces de Cynips gallicoles (jusqu’à 8), qui s’installent en périphérie, sans lui porter préjudice (inquilins).
Mais aussi, des commensaux, qui s’installent dans la même loge que la larve d’origine, pour profiter des ressources alimentaires (commensaux, présence parfois léthale par consommation excessive de nourriture).
Ils ont tous des parasites, des hyper-parasites et des prédateurs, spécialisés ou non.
Certains parasitoïdes s’installent aussi pour tuer l’un ou l’autre.
Puis, les successeurs arrivent, quand tout le monde est parti, pour occuper la galle (charançons, araignées, fourmis, forficules…) + leurs parasites, hyperparasites et prédateurs…
Des espèces phytophages s’intéressent aux tissus nourriciers de la galle + leurs parasites, hyperparasites et prédateurs.
Parfois un acteur invisible : la bactérie Wolbachia, qui parasite les femelles du cécidozoaire afin de n’obtenir que des générations de femelles, assurant sa reproduction.
Conclusion :
La cécidologie est une discipline naturaliste à part entière, touchant à la botanique, l’entomologie et la mycologie.